Le mage du Kremlin
Giuliano Da Empoli
Celui qui habite le Kremlin…
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Il est clair qu’en politique guérir vaut mieux que prévenir. Si vous déjouez un attentat avant qu’il ne se produise, personne ne s’en rend compte, tandis que réagir avec force, épingler les coupables, cela, oui, produit du capital politique. Mais, d’ici à dire que les bombes ont été placées par le FSB plutôt que par des terroristes tchétchènes, il s’en faut.
La politique est un drôle de métier…
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Face à Larry King, le Tsar semblait vêtu en premier communiant.
Note: todo: watch
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Eltsine qui commence à haranguer la foule, visiblement pas tout à fait sobre. Pendant que la voix de notre président résonne, Clinton éclate de rire. C’est inhabituel, mais ce n’est pas grave, il arrive aussi à l’homme le plus puissant de la terre de rigoler. Le problème, c’est que Clinton ne s’arrête pas. Il ne parvient pas à s’arrêter : le vieil ours, titubant, ridicule, le fait littéralement s’esclaffer. Clinton a les larmes aux yeux, le visage écarlate, il est en plein fou rire
Note: todo watch
C’était l’heure de la nuit…
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L’appréhension, l’angoisse, l’horreur face au Mal. Puis la sérénité profonde qui dérive de la résolution d’un conflit et du triomphe du Bien. Il n’y a pas de limites à la capacité créatrice d’un pouvoir disposé à agir avec la détermination nécessaire, pourvu qu’il respecte les règles fondamentales de chaque construction narrative. La limite n’est pas constituée par le respect de la vérité, mais par le respect de la fiction. Le moteur primordial dont il faut tenir compte reste la colère. Vous, les Occidentaux bien-pensants, croyez qu’elle peut être absorbée. Que la croissance économique, le progrès de la technologie et, que sais-je, les livraisons à domicile et le tourisme de masse feront disparaître la rage du peuple, la sourde et sacro-sainte colère du peuple qui plonge ses racines dans l’origine même de l’humanité. Ce n’est pas vrai : il y aura toujours des déçus, des frustrés, des perdants, à chaque époque et sous n’importe quel régime. Staline avait compris que la rage est une donnée structurelle. Selon les périodes, elle diminue ou elle augmente, mais elle ne disparaît jamais
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Réprimer la dissidence est grossier. Gérer le flux de la rage en évitant qu’elle s’accumule est plus compliqué, mais beaucoup plus efficace.
Je n’ai jamais été un passionné…
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Il n’y a rien de plus sage que de miser sur la folie des hommes.
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fur et à mesure que vous construirez votre réseau, vous vous rendrez compte qu’il y a des thèmes auxquels les gens tiennent plus que tout. Je ne sais pas lesquels. Ce sont les clics qui te le diront, Evgueni. Peut-être qu’il y a quelqu’un qui est contre les vaccins, un autre contre les chasseurs ou les écologistes ou les Noirs, ou les Blancs. Peu importe. L’essentiel est que chacun ait quelque chose qui lui tienne à cœur et quelqu’un qui le fasse enrager.
La Russie est la machine…
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Jusqu’à maintenant, le pouvoir a toujours été imparfait. Parce qu’il a dû s’appuyer sur des moyens humains pour réaliser sa promesse.
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Imaginons maintenant que le pouvoir n’ait plus besoin de la collaboration humaine. Que sa sécurité – et sa force – soit garantie par des instruments qui n’ont pas la possibilité de se révolter contre lui. Une armée de capteurs, de drones, de robots capables de frapper à n’importe quel moment, sans la moindre hésitation. Ce serait, finalement, le pouvoir dans sa forme absolue. Tant qu’il se fondait sur la collaboration d’hommes en chair et en os, tout pouvoir, aussi dur fût-il, devait compter sur leur consentement. Mais quand il sera fondé sur des machines qui maintiennent l’ordre et la discipline, il n’y aura plus aucun frein. Le problème des machines n’est pas qu’elles se rebelleront contre l’homme, c’est qu’elles suivront les ordres à la lettre